N° 4 – DECEMBRE 2017

Pour cette dernière Info de l’année, trois sujets que propose Louis : recomposition des partis politiques – Trump et Jérusalem – laïcité.

Les Républicains. Laurent Wauquiez, président du parti et président de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Un leader incontournable et ayant l’ambition d’être la première force d’opposition. Député à 29 ans, sa personnalité présente divers facettes et selon les circonstances son discours est adaptable. Il veut être le meilleur candidat aux prochaines élections, il veut incarner une droite « dure et impitoyable » et « descendre Macron ». Mais il doit mettre de l’ordre dans son parti, le réunifier alors que déjà certains membres le quittent (Xavier Bertrand). Il doit réparer les conséquences désastreuses de la Primaire et des élections présidentielles. Il se moque des technocrates alors qu’il est lui-même issu d’une famille bourgeoise, industrielle et qu’il a fréquenté les grandes écoles, Sciences Po, Ecole Normale Supérieure et ENA. Sa gestion de la région est autoritaire et brutale. Dans sa commune du Puy-en-Velay, il est l’un des rares élus à avoir refusé personnellement de célébrer le mariage entre personnes du même sexe. Ses idées se rapprochent de plus en plus du Front National mais c’est surtout pour détourner les électeurs à son profit. Il voit dans Donald Trump « une source d’inspiration car il n’a peur de rien ». Son propre camp juge sa brutalité : Alain Juppé le qualifie de « tueur », Bruno Le Maire dit « qu’il règne par la terreur », Michel Barnier le taxe « d’ovni, de girouette bruyante ». Ses décisions politiques sont évolutives. Il vient du Centre Droit avec Jacques Barrot qui a beaucoup milité pour l’Europe. Sa vision est de plus en plus à droite, surtout depuis 2010 et on peut relever trois tournants dans cette droitisation. 2010, dénonciation des dérives de l’assistanat, « cancer de notre société » et défense de « celui qui travaille dur pour nourrir sa famille, payer sa maison et son essence et (qui) est parfois moins payé que celui qui vit des allocations de l’assistanat ». 2012, même thème et tentative d’instaurer un travail obligatoire pour les bénéficiaires du RSA, il se fait rappelé à l’ordre par Nicolas Sarkozy. 2014, un livre sur l’Europe intitulé « Europe : il faut tout changer » : « casser l’Union européenne, détruire cet engin ». Son projet, ramener l’Europe à un groupe de 9 pays avec pour objectifs le marché libéral et l’obligation de réduire les dépenses publiques et une réforme de la zone €uro par un fédéralisme technique. Mais en dehors de l’Europe, son objectif est bien la réduction drastique des dépenses publiques, que ce soit dans sa commune comme à la Région. Dans sa commune réduction de 5 à 7 % des dépenses et à la Région, une économie de 300 millions d’€uros sur cinq ans. Baisse et même suppression des subventions aux associations, aux petites communes, plus de projet communes-région. La Région Auvergne-Rhône-Alpes est le laboratoire de la politique très à droite qu’il prône pour le pays.

Trump et Jérusalem. Conformément à la promesse de sa campagne Donal Trump a décidé de proclamer Jérusalem capitale d’Israël et de déménager l’ambassade des Etats-Unis de Tel Aviv à Jérusalem. C’est une décision extrêmement dangereuse et irresponsable, contraire au droit international et qui constitue une forme de légitimation de la politique israélienne d’occupation et de colonisation. Après 50 ans d’efforts pour un consensus international entre nations, pour freiner les ambitions d’Israël, c’est une attaque au processus de paix si difficilement engagé. Comble du cynisme, Trump a désigné son gendre Jared Kushner pour travailler à un nouveau plan de paix à deux états mais pour la Palestine, sur un territoire totalement dispersé. 50 à 60 % de la Cisjordanie seraient placés sous l’autorité des Israéliens. Cette décision provoque aussi des dissensions au sein des Palestiniens, entre le Fatah et le Hamas. La jeunesse palestinienne est très critique sur la colonisation mais a choisi de ne pas suivre les appels à une nouvelle Intifada, à de nouvelles violences. Le Hamas, mouvement militaire appelle à la révolte mais celle-ci est dangereuse et inefficace. 25 ans après les Accords d’Oslo qui avaient engagé tout le processus des négociations, c’est l’espoir pour les Palestiniens, de vivre dans un état souverain, qui s’éloigne encore. Le résultat de la décision de Trump c’est que l’emprise et la position hégémonique d’Israël sont confortées.
La commune de Jérusalem-Ouest doit voter pour entériner le fait, pour légaliser la décision. Les Palestiniens, fatigués, découragés en veulent au Président de l’Autorité Palestinienne, Mahmoud Abbas, qu’il voudrait même voir disparaître. Mais du coup, quid des territoires administrés par l’Autorité Palestinienne qui seraient alors à la charges des Israéliens ? L’ONU est active sur la question des colonies mais Israël ne respecte aucune injonction. Elle est aussi à l’origine de la formation de l’Autorité Palestinienne pour gérer certains territoires et de la reconnaissance de la Palestine par 140 pays. La Palestine fait partie de l’UNESCO et est membre observateur à l’ONU.
Ce qu’on pourrait envisager : une intervention de l’Europe avec la France leader du mouvement et principal bailleur pour la Palestine, et la volonté d’Emmanuel Macron. Il faudrait au moins que les décisions de l’ONU soient respectées.

Laïcité. Les pays sont traversés par des mouvements identitaires. Nous avons une loi qui dit que l’état doit se consacrer au bien-commun de tous, avec liberté de conscience, liberté d’exercer le culte, le cultuel séparé de la politique et la République au-dessus. C’est un idéal de concorde.
Dans le gouvernement Macron, Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics, est chargé de travailler sur un projet de loi dite « Loi pour une société de confiance ». L’artiche 4 de la loi de 1905 dit que les associations cultuelles ont pour but d’assurer la libre pratique des cultes et qu’elles peuvent acquérir des biens pour l’exercice de leur culte et dans ce cas seulement, ces biens sont exonérés de fiscalité. Or dans le projet de loi ces associations cultuelles ont toujours le droit d’acquérir ou de recevoir par dons et legs des biens immobiliers défiscalisés mais sans la condition de l’usage pour la pratique du culte. La loi permettrait, par modification de l’article 19 de la loi de 1905, aux associations cultuelles de « posséder et administrer tout immeuble acquis ou gratuit » donc y compris un patrimoine lucratif sans aucun lien avec le culte. Il s’agit d’une remise en cause des principes de la loi de 1905 : le libre exercice des cultes, (art.2), des associations ayant ce seul objet (art.4), et bénéficiant à ce titre d’avantages fiscaux. (art.19). C’est une rupture d’égalité entre les « associations cultuelles » et l’ensemble des autres organismes, associatifs, industriels et commerciaux, qui restent tenus de déclarer leurs « opérations d’influence ». Et pire des inégalités, ce ne sont pas n’importe quels cultes qui en bénéficieront : seront exemptés de l’obligation de transparence dans leurs rapports avec les pouvoirs publics et pourront faire de l’argent avec le patrimoine immobilier reçu en donation les seuls cultes catholique, protestant et israélite, soit les cultes reconnus du Concordat de Bonaparte. Le libre exercice et le principe d’égalité entraînent l’interdiction de toute discrimination, directe ou indirecte, des pouvoirs publics à l’égard d’un culte Or, c’est ce à quoi aboutirait le texte de l’article 38, II du projet de loi. Au regard du seul principe d’égalité, sa constitutionnalité paraît pour le moins douteuse.