12 – CAMILLE DE CAVOUR, UN SOCIAL-LIBERAL AUX RACINES SAVOYARDES

Gilles CARRIER-DALBION Guide du Patrimoine de Savoie – Château de Thorens et La Roche-sur-Foron.
21 mars 2018
Comment l’influence des idées libérales et sociales de sa grand-mère paternelle et ses expériences européennes ont fait de Camille de Cavour l’homme de l’Unité italienne.

Camille de Cavour n’a pas forcément bonne presse dans le Duché de Savoie. Ce n’est pas un génie mais il s’était préparé à la fonction. En France, il disparait de l’histoire mais en Italie c’est l’homme de l’unification.
Camillo Benso, comte de Cavour est né à Turin le 10 août 1810 ; ville rattaché à la France du Premier Empire. Son père, Michele Benso de Cavour est un noble piémontais catholique. Sa mère Adèle de Sellon appartient à une famille calviniste de Genève. Son parrain est le gouverneur prince Camille Borghèse. Et sa grand-mère paternelle, Philippine de Sales (1761-1849) est l’arrière-petite-nièce de Saint François de Sales. Philippine est née au Château de Thorens, vendu par les princes de Luxembourg-Martigues à Saint François de Sales à l’aube du 17ème siècle. Durant cette époque, la famille de Sales connait une élévation de leur vie. Elle acquière plusieurs demeures, Annecy, Turin, Genève. Chaque génération compte des hommes de pouvoir et de grade. En 1698, Les châteaux de Duingt et de Châteauvieux sont achetés par la famille de Sales, qui les conserve jusqu’à la révolution. L’arrière-grand-père, Paul-François de Sales, comte de Duingt crée une manufacture de verre et imitation de cristal qui deviendra manufacture royale en 1775.
Camille de Cavour a un père attentionné (1781-1850), mais c’est sa grand-mère aura la plus grande influence. Elle-même est influencée par Benoît-Maurice de Sales, marquis (1760-1797) franc-maçon qui allie conservatisme et modernité, culture, ouverture d’esprit. Le Comte Eugène de Roussy de Sales (1822-1915), cousin de Camille, est un homme enjoué, passionné et les deux cousins s’estiment comme deux frères. Il se passionne pour le château de Thorens, s’implique dans sa gestion. Capitaine d’artillerie dans l’armée piémontaise, il quitte l’armée pour se marier ce qui provoque la colère de Camille !. Le château est ruiné sous l’occupation française, il sera restauré dans les années 1870. Eugène se retrouve à la tête de l’héritage des Cavour, les archives restant en Italie.
Philippine de Sales se marie avec le marquis Joseph de Cavour en 1781, de 20 ans plus âgé. Ils vivent au château de Santena qui passa en 1746 aux mains de la branche des marquis Benso de Cavour. La marquise de Cavour remet à flot la fortune en berne des Cavour et prend l’ascendant sur la famille. Elle a un fils Michele Benso de Cavour, homme tranquille, père de Camille. Le couple de Cavour est ami avec Pauline Bonaparte et son époux Camillo Borghèse et profite de leur bienveillance impériale. Philippine va passer d’une orthodoxie rigoureuse à une personnalité rayonnante, libérale et montrera un goût pour la philosophie des Lumières. Elle est très complice avec son petit-fils. Ce dernier s’attache à Bonaparte et laisse un peu la Maison de Savoie mais finalement se rapprochera de Victor-Emmanuel 1er. Sa mère genevoise, convertie au catholicisme ouvre ses salons et reçoit de nombreuses personnalités européennes. Camille, par ses rencontres, s’intéresse à tout, agriculture, chemins de fer, entreprises industrielles, presse, politique. Il entre en politique à 37 ans, est député en 1848. Il est contre la reprise des hostilités avec l’Autriche, travaille pour des traités qui favorisent els échanges entre pays européens. Il se tient à l’alliance centre-gauche. 1848-1849, première guerre d’indépendance italienne, premier des nombreux conflits qui opposent le royaume de Sardaigne à l’Empire d’Autriche et qui se termine par la répression envers les républiques de Rome er de Florence et la reconquête de Venise. De 1853 à 1856 sévit la guerre de Crimée pour contrer l’expansionnisme russe ; il oppose l’Empire russe à une coalition formée de l’Empire ottoman, la France, le Royaume-Uni et le royaume de Sardaigne et se termine par la défaite de la Russie, entérinée par le Traité de Paris de 1856. Camille de Cavour met en avant la réunification de l’Italie, il se trouve un allié en la personne de Napoléon III. Entretien de Plombières entre Cavour, président du conseil et Napoléon III qui acte une aide militaire de la France à la Sardaigne pour unifier le royaume d’Italie, contre l’Autriche. Napoléon III convoite la Savoie alors que Cavour déteste la Savoie. Le 28 janvier 1859, signature de l’Alliance franco-sarde, pacte militaire entre le Royaume de Sardaigne et l’Empire français qui modifie les accords de Plombières. Cette alliance garantit l’aide militaire de la France aux Etats sardes en cas d’agression autrichienne. En échange, elle prévoit la cession à la France de la Savoie et de Nice. Le 10 juin 1859, Victor-Emmanuel proclame: « … Nous ne sommes pas insensibles aux cris de douleurs qui depuis de nombreuses régions d’Italie se lèvent vers Nous… ». Un désarmement proposé par l’Autriche est repoussé et c’est la deuxième guerre d’indépendance, guerre sanglante – Bataille de Magenta, de Solferino, deux victoires de l’armée franco-sarde contre l’Autriche. Napoléon III et François-Joseph signent l’armistice de Villlafranca le 11 juillet 1859 sans avertir Victor-Emmanuel qui voudrait continuer la guerre.
Cavour se retire à la campagne mais revient en 1860 aux affaires politiques et travaille à l’annexion de Nice et du duché de Savoie. Un seul but, l’unité de l’Italie, une nation mais sans sacrifier la liberté à l’indépendance, une foi absolue dans la liberté. La politique est pour lui avant tout l’art du possible, la science du « juste milieu ». Traité du 24 mars 1860. Suffrage universel masculin, volonté du peuple. 17 mars 1861, vote au parlement et proclamation du Royaume d’Italie.
Camille de Cavour meurt le 6 juin 1861 d’une crise de paludisme. Il aura connu de nombreuses expériences européennes, lu les grands auteurs européens, ce qui a forgé son regard au-delà de son petit pays. Pour lui, Paris, Londres, Genève sont des villes de lumière, de culture, des villes intellectuelles. Il visitera les salons, les théâtres, les universités, les entreprises, les prisons en France, en Angleterre comme en Belgique. Ses voyages forgeront ses idées sociales- libérales et lui permettront d’appréhender une société en profonde transformation