N° 3 – LA DETTE PUBLIQUE : FAUX DÉBAT OU VRAIS ENJEUX ?

Marie Jo EGGER – Marc GINDRE – Professeurs d’économie et de sciences sociales – 16 octobre 2013 – 62 participants. – La dette publique, de quoi parle-t-on ? Comment en est-on arrivé là ? La situation est-elle grave ? Quels scénarios pour en sortir ?
Idées générales : la dette publique n’est pas la dette de l’état. Droite et gauche se rejettent la faute. On trouve des boucs émissaires, les riches, les pauvres, les étrangers, les assistés … Exploitation politique de notre inculture. Il n’y a qu’à … loin de la réalité.
La dette, de quoi parle-t-on ? Des ressources et dépenses publiques pour les administrations publiques et l’organisme divers d’’administration centrale : TVA(ODAC) et non pas seulement l’état. Ressources : TVA – Impôt sur le revenu, sur les sociétés – Recettes non fiscales – Produits pétroliers – Ressources territoriales – Cotisations sociales pour alimenter retraites, CAF, CPAM, UNEDIC, toutes les prestations sociales. Dépenses : Ville – Logement – Enseignement – Défense – Recherche – Ecologie – Organismes sociaux
2012 : Etat + ODAC + Social + Territorial – Recettes pour chacun = 335 +80 + 520 + 233 – Dépenses pour chacun = 416 + 82 + 533 + 536 / D’où un besoin de financement de 99 milliards d’€uros.
Le financement du déficit public : 1 – La Banque Centrale crée de la monnaie mais le financement monétaire est interdit en zone euro. 2 – Les marchés financiers avec des obligations mais remboursement avec des intérêts. C’est la seule solution. Emprunts à long, moyen et court terme, bons du Trésor, obligations. Les créanciers sont à 55% des étrangers. Au 1er juillet 2013, la dette était de 1912 milliards d’€uros soit 93.2% du PIB dont 50% état et 12% social. Dans les années 70 elle était inférieure à 100 milliards. Compteur de la dette : cluaran.free.fr
La croissance de la dette est-elle un problème ? Oui : les entreprises, les ménages, les collectivités locales, l’état ont besoin de financement. En face, l’épargne des ménages mais qui n’est pas suffisante d’où effet d’éviction. Appel à l’étranger et tension sur les taux d’intérêt = argent plus cher. Oui : service de la dette – remboursement- qui représente 64 milliards des dépenses de l’état. Non : selon l’évolution de l’endettement ce n’est pas la France qui est endettée mais les ménages avec un taux d’endettement de 60%, les entreprises à 60% et l’administration à 90%. Le Japon est endetté à 293%, les USA à 100%. En soit la dette n’est pas problématique mais il faut voir ce que l’on achète avec. Après déduction de la dette le patrimoine net en 2010 était de 517 milliards d’€uros.
Comment en est-on arrivé là ? Espérance de vie, coût de l’individu lié à l’âge. Accroissement des dépenses sociales, retraites. Coût de la scolarité. Besoins de formation. Coût d’un bachelier = 100 000 €uros. Demande forte en terme de santé, d’éducation. Les ressources : crise des années 80, taux de croissance en baisse, hausse du chômage représentent un manque à gagner pour l’état, les organismes sociaux, les communes. Et en même temps, l’augmentation des prestations – maladie, chômage, aide aux entreprises – font un effet de ciseau. Quels choix politiques : baisse de la TVA sur la restauration, défiscalisation des heures supplémentaires, réduction d’impôts, niches fiscales. Contrairement à l’idée reçue on paye de mois en moins d’impôt. La part moyenne de l’impôt sur le revenu des ménages est passée de 5 % en 2001 à 3.8 % en 2011.
Tout cela est lié à la libéralisation, à la dérégulation. Les indices de libéralisation sont au plus haut, 0 en 1973, 3 en 2005. Plus aucune contrainte, plus de contrôle de l’état sur le crédit, les taux d’intérêts. Plus de contrôle des changes. Privatisations. Plus aucune limite au déficit, au surendettement. Les agences de notation qui, selon la note qu’elle donne à un état sur la capacité qu’il a à assurer ses dettes, influencent le taux de remboursement des dettes. Par exemple, en janvier 2012, la Grèce remboursait au taux de 75 %, la France à un taux inférieur à 4 % et en septembre 2003, à moins de 2.5 %
Et maintenant ? Réduire l’endettement. Par les dépenses mais lesquelles, choix difficiles car les effets sociaux de ces choix sont très différents. Par les recettes : TVA, l’impôt le plus injuste ? Impôt sur le revenu ? Sur les bénéfices des sociétés ? Sur le capital ? Augmenter les cotisations sociales des employés, des employeurs ? CSG ? Là aussi les choix politiques ont des effets différents.
Taux d’imposition en France : classes populaires, moyennes et aisées sont à une moyenne de 45 %. Les très aisés sont à unj taux inférieur à 40 %. Le taux maximum en 1990 était de 56.8 %, en 2013 il était inférieur à 45 %. Réduire l’endettement c’est une politique d’austérité. A – Sous la surveillance, la pression de l’étau européen. 477 députés sur 578 ont voté pour un budget équilibré en 2017, une dette publique égale ou inférieure à 60 %. Sinon, mécanisme de corrections, amendes. La France prévoir un déficit de 60 milliards d’€uros pour 2014. B – Sous l’œil des marchés. Si on inspire confiance, on est jugé crédible, on trouvera facilement des créanciers. La note est une variable stratégique : pour une différence de 1 % du taux de remboursement, pour 100 milliards d’€uros empruntés sur 10 ans à 2.72 % c’est 14 milliards d’€uros d’intérêts, à 3.72 % c’est 20 milliards d’€uros.
Mais le désendettement est à haut risque : ralentissement de la consommation, baisse des investissements, des exportations, chômage en hausse, baisse de l’assiette fiscale = augmentation des déficits = spirale de la dette. Il faudrait faire tout et son contraire, augmenter, réduire les dépenses publiques. D’autres solutions : l’inflation c’est l’allègement du poids réel de la dette mais c’est l’impôt du pauvre. Répudiation – restructuration de la dette comme en Grèce ?
Les plus aisés profitent de la dette car ce sont eux qui détiennent les titres de créance. On s’endette, c’est une nouvelle forme d’esclavage, aliénation au travail, exploitation, armes, guerre.