N° 11 – CE QUE RACONTENT LES PIERRES. GÉOLOGIE ET PRÉHISTOIRE DU HAUT-RHÔNE ET SA RÉGION

Jean Pierre FILLION – Naturaliste, passionné de préhistoire – 12 février 2014 – 58 participants.
Les pierres racontent de belles histoires : voyage de chaque côté du Rhône à la découverte de continents disparus, de chaînes de montagne érodées, de voyageurs du temps passé.
Le Haut Rhône est cette région qui englobe depuis le pied des monts du Jura, quelques kilomètres de la chaîne des Alpes, le Crédo, la Michaille, la Semine. Partons du système géologique le Trias, précédé par le Permien et suivi par le Jurassique, période comprise entre – 250 à – 200 millions d’années. Tous les continents sont soudés. La tectonique des plaques, soit l’ensemble des mouvements des plaques plus ou moins rigides constituant la lithosphère terrestre va agir en interactions soit divergence, convergence et coulissage pour faire apparaître les continents. Les plus anciennes traces géologiques, – 220 millions d’années, sont trouvées à Champfromier dans le Jura : argile à gypse, marnes irisées. Jurassique inférieur, période entre – 199,6 et – 175,6 millions d’années : mollusques, gryphées proches de l’huitre. Le Jurassique supérieur, période la plus courte du Jurassique, entre – 161,2 et – 145,5 millions d’années, voit la naissance du supercontinent le Laurasia au nord et du Gondwana au sud. Dinosaures, mammifères, oiseaux, plantes à fleurs. Annemasse est une mer profonde à – 140 millions d’années : récif, massif corallien dont on découvre les vestiges à Saint Germain de Joux : gastéropodes, lamellibranches, oursins dans le calcaire (qui sera broyé pour fabriquer le verre). A Orbagnoux : schistes bitumineux, exploités dans les mines depuis la fin du 19ème siècle, fougères géantes, poissons, conifères (pas de feuillus). A Emosson, traces de dinosaures dans le calcaire. A Coisia dans l’Ain, une dalle d’environ 156 m2 expose plus de 170 traces de pieds et de mains de sauropodes agencées en au moins 9 pistes de locomotion distinctes. Dans ce même lieu traces de marées sur les bords des plages. Période du Crétacé entre – 145,5 et – 65,5 millions d’années, climat particulièrement chaud, retour de la mer, développement du plancton, phosphate, ammonites, nautiles, grands reptiles aquatiques, oursins. La fin du Crétacé est marquée par une crise biologique qui voit disparaître les dinosaures mais aussi 76 % des espèces marines de la planète. La mer se retire, dans la molasse on trouve huitres, dents de petits squales, de requins (carcharodon). L’ère tertiaire, ère géologique qui s’étend de – 65 à – 2,6 millions d’années. Soulèvement du Jura après le retrait de la mer (période miocène), climat plus sec, température en baisse. Élévation de la Cordillère des Andes, suite de la formation des Alpes, de l’élévation de l’Himalaya, de la collision de la plaque indienne avec l’Asie. Le Cervin est un morceau de l’Afrique. Formation du pli-faille du Vuache, résultat de contraintes en extension et en compression.
Une longue période de climat extrêmement rigoureux et la formation d’immenses glaciers, va repousser l’arrivée des hommes dans notre région. Les derniers glaciers vont disparaître à partir de – 12000 ans. Le lac Léman, lac glaciaire se forme. D’où présence de blocs erratiques, fragments de roche qui peuvent être de taille importante, déplacés par un glacier parfois sur de grandes distances et abandonnés sur place lors de la fonte du glacier. Les Néandertaliens apparaissent vers – 200000 ans en Europe et au Moyen Orient. On en trouve des traces dans notre région, entre deux périodes glaciaires : outils, silex. Ce sont des chasseurs-cueilleurs qui chassent le mammouth, le rhinocéros laineux. Vestiges dans l’Ain, outils bifaces. A Onnion, dans la Grotte du Baré, 10 artefacts en quartzite, matière première collectée à 10 kms de la grotte. Notre ancêtre direct, le Cro-Magnon arrive en Afrique à – 120000 ans.
A – 15000 ans, les Magdaléniens occupent notre région. Ils habitent des grottes, des abris formés par des effondrements de roche ; abri de la Colombière, (Neuville-sur-Ain), grotte des Hoteaux (Rossillon dans l’Ain). Ce sont des chasseurs qui se spécialisent, par exemple chasseurs de rennes. Outils, galets gravés de figures d’animaux, sagaies, silex pour gratter les peaux. Beaucoup d’objets découverts dans les Usses.
Le climat se réchauffe, les Magdaléniens suivent les rennes vers le nord. C’est la fin de la dernière glaciation.
Le Mésolithique période chronologiquement et culturellement entre le Paléolithique et le Néolithique, entre – 10000 et – 5000 ans. Les groupes humains perpétuent un mode de subsistance basé sur la chasse et la cueillette sous un climat tempéré. Abri de « Sous Sac » sur le versant est du Valromey, outils en cristal de roche, chasseurs d’ours, de sangliers. Le Néolithique marque l’origine de l’agriculture au Moyen-Orient, Turquie, Irak, Syrie. Cette agriculture arrive en France vers – 5800 ans et avec l’élevage, va bouleverser le monde des chasseurs-cueilleurs. Grotte de la Bressane engloutie par la construction du barrage de Génissiat et que l’on peut observée lorsque le Rhône est au plus bas pour son nettoyage des boues et sédiments accumulés par les barrages. Matériel exposé à Genève.
« Gorges du Rhône ; 350 m environ ; grotte ; habitat ? Le porche de la grotte dominait de 30 m le cours du Rhône, dans les gorges en aval de Bellegarde. Elle a été noyée par le lac de barrage de Génissiat.
Visitée par plusieurs genevois : Raoul Montandon en 1912, A. Jayet, qui a réalisé un sondage, G. Amoudruz, et surtout Olivier Reverdin, qui y a fouillé en 1929. Ce dernier a reconnu une couche en place (n° III) avec occupations néolithiques à foyers et aménagements. Le mobilier céramique montre la présence de plusieurs phases du Néolithique moyen avec des composantes Saint-Uze et Cortaillod.
Coll. Amoudruz : 1 gaine simple. — M.A.H. Genève : 6 lames polies et fragments (n° 90-131, -133, -135 à -137 et -140). »
Lac de Paladru : poignards. En Michaille : silex découverts dans les labours en grande quantité (silex du crétacé dans la molasse). Pierres à cupules, lames de faucille, haches, pointes de flèche selon une technique qui vient du sud. Culture de céréales (faucilles). La hache, le poignard définissent le rang social.
Les spécialistes qui fabriquent ces outils voyagent pour leur diffusion : on en trouve jusqu’en Ecosse. A Saint- Cergues, à Reignier, dolmens (Pierre aux fées) : sépultures.
A – 2000 ans, on trouve des objets de la culture campaniforme. C’est une culture qui se développe en Europe ainsi qu’en Afrique du Nord approximativement au cours du troisième millénaire avant notre ère, couvrant l’Énéolithique et le Bronze ancien européen. Elle doit son nom aux gobelets céramiques en forme typique de cloche retrouvés dans les sépultures.
L’Âge du Bronze et l’âge du Fer. « Les âges des Métaux couvrent les vingt-deux siècles qui séparent la diffusion de la métallurgie du bronze, vers -2200 en France, de la conquête romaine de la Gaule en -52. Durant l’âge du Bronze (de -2200 à -800) puis l’âge du Fer (de -800 à -52), de profondes évolutions touchent tous les aspects de la société : innovations technologiques, refonte des réseaux commerciaux et intensification des échanges, apports démographiques, accroissement de la hiérarchisation sociale, basculement, à partir du VIe siècle dans l’orbite culturelle et économique du monde méditerranéen, émergence de la ville et d’une économie monétaire, mise en place de pouvoirs politiques centralisés… « Pierre Jacquet
Un site très intéressant est le Marais de Lavours (Culoz) qui laisse penser qu’il a été occupé à partir de – 3700 ans. Un abri sous-roche révèle de nombreuses gravures qui, peut être, sont des cartes, des cadastres, représentation du parcellaire agricole.
Site à consulter : homidides.com
Livre disponible au Conseil Général : La Haute-Savoie durant la Préhistoire, de 40000 à 5500 avant JC. Ouvrage collectif avec la participation de Jean-Pierre FILLION
Un exposé très brillant et passionnant bien que technique. Exposition d’objets que le conférencier a fabriqués à l’identique des originaux.