BILLET D’HUMEUR N° 2 – JANVIER 2014

L’année 2013 se termine avec la disparition de cette grande figure de la paix qu’était Nelson MANDELA. Oui, de la paix car à la violence, à la vengeance contre les blancs de l’apartheid, il a préféré le chemin de la réconciliation et de l’unité nationale. Un long chemin reste à faire en Afrique du Sud pour une égalité totale mais l’essentiel est là, l’égalité dans les lois. Les dirigeants du monde entier lui rendent hommage, même ceux qui l’ont combattu, ceux qui ont soutenu le régime honni de l’apartheid. Il en va ainsi quand un grand homme s’en va, chacun de se l’approprier ! Pour ma part, je veux garder le souvenir de l’honnête homme digne et fort qui a formé ma jeune conscience de militante, dans le combat pour sa libération.
L’apartheid n’existe plus mais combien de régimes discriminatoires, combien de peuples opprimés pour leurs différences, ethnique, religieuse, politique ? Combien de bouc-émissaires dans le monde en crise où chacun se replie sur soi ? Même en France, notre beau pays, que n’entendons-nous pas comme injures racistes, dénigrement de l’autre, condamnation haineuse, mépris ? Comment se protéger de ces paroles, de ces actes honteux ? Comment faire entendre une autre parole ? La France serait-elle majoritairement raciste, égoïste ? Ou alors serait-ce les médias qui, pour faire de l’audience, choisissent de diffuser les actes et les paroles les plus choquants ?
Je crois très sincèrement que nous ne devons pas baisser les bras, céder au découragement. Non, le combat pour un monde plus équitable n’est pas perdu, tant qu’il restera des hommes et des femmes de bonne volonté, des militants de la paix et de la justice, des écrivains et des poètes. Mais aussi de la musique, du cinéma, du théâtre, car la culture est une arme de combat contre l’ignorance. Le travail de l’éducation doit être de faire reculer la peur de ce que l’on ne connaît pas, d’ouvrir les esprits, de susciter la curiosité, le désir d’aller voir au-delà des apparences. C’est en cela que l’éducation populaire joue son rôle : ne pas seulement transmettre du savoir mais former les esprits à la réflexion, à la critique. A ne pas prendre pour argent comptant tout ce que les dirigeants, les partis politiques, les experts, les médias voudraient nous faire croire à force d’être rabâché. Et il est aussi de notre devoir, nous qui adhérons aux valeurs des Universités populaires, de faire entendre notre parole quand nous sommes confrontés à l’inacceptable. Ne rien laisser passer car ne rien dire ne serait-il pas acceptation tacite ? Les rires d’un auditoire en réponse aux paroles racistes d’un élu ne sont-ils pas plus glaçants que les paroles elles-mêmes ? (Roquebrune-sur-Argens et les Roms qu’il faudrait laisser brûler). Bien sûr, nous n’allons pas changer radicalement le monde mais « tu veux un monde meilleur, plus fraternel, plus juste ? Et bien commence à le faire : qui t’en empêche ? Fais-le en toi et autour de toi, fais-le avec ceux qui le veulent. Fais-le en petit, et il grandira » Carl G. Jung.
A tous, je souhaite une très bonne année, dans vos vies de famille et ensemble.
Françoise
En ce début d’année, voici un cadeau, du Slam, poésie chantée, urbaine comme nous l’ont fait connaître les jeunes slameurs de la fête des 20 ans, un cadeau pour tous et aussi pour Emile qui, je crois, aurait aimé.
Course contre la honte – Duo de Grand Corps Malade et Richard Bohringer
Grand Corps Malade : Tonton, est-ce que t’as regardé dehors ? Sur l’avenir de nos enfants il pleut de plus en plus fort … Quand je pense à eux pourtant, j’aimerai chanter un autre thème – mais je suis plus trop serein, je fais pas confiance au système – Ce système fait des enfants mais il les laisse sur le chemin – Et il oublie que s’il existe, c’est pour gérer des êtres humains – On avance tous tête baissée sans se soucier du plan final – Ce système entasse des gosses et il les regarde crever la dalle – Tonton on est du bon côté mais ce qu’on voit, on ne peut le nier – J’ai grandi au milieu de ceux que le système a oubliés – On vit sur le même sol mais les fins de mois n’ont pas le même parfum – Et chaque année monte un peu plus la rumeur des crève-la-faim – Le système a décidé qu’il n’y avait pas de place pour tout le monde – Tonton, t’as entendu les cris dehors, c’est bien notre futur qui gronde – Le système s’est retourné contre l’homme, perdu dans ses ambitions – L’égalité est en travaux et y’a beaucoup de déviations.
Tonton, on va faire comment, tu peux me dire ? Comme il faut que tout soit rentable, on privatisera l’air qu’on respire – C’est une route sans issue, c’est ce qu’aujourd’hui, tout nous démontre – On va tout droit vers la défaite dans cette course contre la honte. Eh Tonton … On va faire comment ? Dis-moi Tonton, on va faire comment ? Entre le fromage et le dessert, tout là-haut dans leur dîner – Est-ce que les grands de ce monde ont entendu le cri des indignés – Dans leur viseur de la souffrance, y’a de plus en plus de cibles – Pour l’avenir, pour les enfants, essayons de ne pas rester insensibles.

Richard Bohringer : Ma petite gueule d’amour, mon Polo, mon ami Châtaigne – On va rien lâcher, on va aimer, regarder derrière pour rien oublier, ni les yeux bleus ni les regards noirs – On perdra rien, peut-être bien un peu, mais ce qu’il y a devant c’est si grand – T’as bien le temps d’avoir le chagrin éternel – S’ils veulent pas le reconstruire le nouveau monde, on se mettra au boulot – Il faudra de l’utopie et du courage – Faudra remettre les pendules à l’heure, leur dire qu’on a pas le même tic-tac, que nous, il est plutôt du côté du cœur – Fini le compte à rebours du vide, du rien dedans –
Ma gueule d’amour, mon petit pote d’azur, il est des jours où je ne peux rien faire pour toi – Les conneries je les ai faites, et c’est un chagrin qui s’efface pas – Faut pas manquer beaucoup pour plus être le héros, faut pas beaucoup – Je t’jure petit frère, faut freiner à temps – Va falloir chanter l’amour encore plus fort – Y’aura des révolutions qu’on voudra pas et d’autres qui prennent leur temps, pourtant c’est urgent – Où est la banque ? – Il faut que je mette une bombe, une bombe désodorante, une bombe désodorante pour les mauvaises odeurs du fric qui déborde – Pas de place pour les gentils, pour les paumés de la vie – Chez ces gens-là, on n’aime pas, on compte.
Ma petite gueule d’amour, mon Polo, mon ami Châtaigne – P’tit frère, putain, on va le reconstruire ce monde – Pour ça Tonton faut lui tendre la main – Tonton, il peut rien faire si t’y crois pas – Alors faudra se regarder, se découvrir, jamais se quitter – On va rien lâcher – On va rester groupé – Y’a les frères, les cousines, les cousins, y’a les petits de la voisine, y’a les gamins perdus qui deviennent des caïds de rien, des allumés qui s’enflamment pour faire les malins – Y’a la mamie qui peut pas les aider, qu’a rien appris dans les livres, mais qui sait tout de la vie – A force de ne plus croire en rien, c’est la vie qui désespère – Faut aimer pour être aimé – Faut donner pour recevoir – Viens vers la lumière p’tit frère – Ta vie c’est comme du gruyère, mais personne te le dis que tu as une belle âme – Ma petite gueule d’amour, mon Polo, mon ami Châtaigne – On va rien lâcher – On va regarder derrière pour rien oublier.

Texte extrait de l’album FUNAMBULE