N° 3 – INFO DU MOIS – NOVEMBRE 2017

Retour sur l’Info d’octobre : les explications selon des références historiques et livresques ne sont pas pour autant une explication claire du projet du président. Si l’entreprise, pour lui, est au cœur de la société et même si elle est un vecteur des libertés individuelles, se posent des questions : quid de la démocratie, du temps de la discussion et de la négociation dans l’objectif d’aller vite ? Où est le temps de la démocratie ? Sa recherche d’efficacité est-elle compatible avec la recherche du bien commun, un bien commun qui ne se définit pas par des algorithmes, des calculs ? Le bien commun ne peut être obtenu qu’avec du temps, des expertises. Et si la France doit obéir à une baisse imposée du déficit de 3%, il faudra de l’efficacité et le bien commun en souffrira.
Plusieurs questions à traiter ce soir :

A – Si les riches, premiers de cordée, sont soumis à moins d’impôts, est-il vrai que ce sont ces riches qui vont dynamiser l’économie ? Une réalité ou une croyance ? On peut en douter selon l’opinion de Louis. Pourquoi : 1 – La consommation des très riches n’est pas productrice de richesses, les produits de luxe sont peu renouvelés et sont donc produits en faible quantité. 2 – A contrario, la consommation de masse est productrice de richesses, car on doit produire beaucoup pour acheter beaucoup. La masse fait vivre les riches. 3 – Les produits de luxe, souvent gaspillés, sont fabriqués à partir de matières premières rares et souvent polluantes. Rapport OXFAM : la consommation des 10% les plus riches est responsable de 50% de la pollution et il faut la consommation des 50% des moins riches pour arriver aux 10% de ce qui est gaspillé. Conclusion : tant que les inégalités des revenus perdureront, il n’y a aucune chance de sortir de la crise économique et écologique. Et l’exemple du gaspillage des riches encourage les moins riches à gaspiller à leur tour.

B – Brexit. Des tensions qui montent, une mobilisation populaire pour rester dans l’UE (selon les sondages 82% sont contre le Brexit). Les négociateurs anglais ne mesurent pas la complexité de la sortie, ce sont des amateurs en la matière, comme Theresa May, qui est contre mais qui le défend aujourd’hui en menaçant d’être intransigeante dans les négociations, provoquant des divisions au sein de son parti. Les Anglais ont cru à la révolution, ils voulaient tous les avantages du Marché unique européen, ils voulaient se débarrasser des dettes européennes de 100 milliards d’€uros mais le négociateur, Michel Barnier, connaît bien ses dossiers et c’est lui qui est en position forte. C’est Waterloo pour les Anglais qui vont se retrouver dans la situation des Norvégiens quand ils ont quitté l’Europe : la Norvège bénéficie du marché européen interne mais elle est exclue des marchés européens hors de l’Europe, des marchés avec l’extérieur et doit participer financièrement au budget européen.

C – Séparatisme. Un certain nombre de pays européens connaît une crispation identitaire qui pousse à vouloir être seul, indépendant, autonome. La Catalogne, l’Italie du Nord, la Lombardie, la Vénétie (ancienne province autrichienne), une province du Nord-ouest de la Tchéquie (Président populiste), la Flandre et la Wallonie. Globalement, on perd le sentiment d’appartenance à un territoire et à une culture. Dans notre région, au vu des déplacements d’une région à une autre pour le travail, exemple des villages autour du bassin genevois où il n’y a plus de vie commune et de communication, où on se désintéresse de ce qui se passe dans le village et localement. Plus de solidarité, comme la Catalogne qui ne veut pas payer pour les régions plus pauvres. Recherche identitaire qui installe des comportements racistes et xénophobes. Si le but du désir d’indépendance était d’avoir plus de liberté on pourrait négocier des marges de manœuvre, mais ce n’est pas le cas. En peu de temps, des mouvements séparatistes se lèvent mais ils ne parlent que de référendum, oui ou non pour la séparation. Le référendum n’est certainement pas la solution car quitter un pays, une entité, c’est tellement complexe, cela ne peut pas tenir qu’à des discours, des slogans de quelques politiques. Oui ou non est une réponse binaire à une question très complexe. Le référendum est un piège et finalement personne n’est satisfait comme le révèlent les réactions au Brexit.
4 – Allocations familiales en fonction du revenu ou pas. Les allocations sont une protection de la famille et toutes les familles y ont droit en fonction du nombre d’enfants. C’est l’héritage du CNR à la fin de la guerre. Si on indexe les allocations familiales sur les revenus, n’allons-nous pas nous imposer des remboursements de la sécurité sociale indexés à leur tour aux revenus ? Il faut garder le système universel des allocations familiales et de la sécurité sociale pour que les riches défendent ce principe de solidarité puisqu’ils en profitent.

5 – Paradis fiscaux. Le plus grand scandale est révélé actuellement, une fraude fiscale qui grève dangereusement les économies des pays. Pour la France, il s’agit de 80 à 100 milliard d’€uros par année. L’optimisation c’est profiter des mécanismes légaux pour échapper à l’impôt ce qui provoque une évasion fiscale des plus riches de France et d’Europe. La fraude fiscale, c’est trouver des arrangements illégaux pour ne pas payer d’impôts dans son pays et cacher ses biens dans les pays à faible taux d’imposition. Les deux systèmes servent aussi à blanchir l’argent sale. Ce qui est fait jusqu’à aujourd’hui pour lutter contre la fraude fiscale : les pays se sont engagés à la transparence, en échangeant leurs données bancaires et en respectant la Loi contre le blanchiment. Ce qui n’est pas encore fait en matière d’optimisation : l’Europe pourrait exiger la transparence sur ce que gagnent les entreprises et sur le montant de leurs impôts, il faudrait encadrer les officines qui sont les champions des mécanismes de l’optimisation fiscale. Il faut saluer le super travail des journalistes d’investigation qui mettent au grand jour ces scandales mais il faut que les politiques s’en emparent.

6 – Faim dans le monde. Plus d’un milliard de personnes qui souffre de la faim et un milliard de plus qui souffre de malnutrition. Un monde sans faim est-il possible ? En 1991, les nations autour de l’ONU prenaient l’engagement d’éradiquer la faim dans le monde en 10 ans. Hélas c’est raté. Pourquoi ? Multiplication des guerres, dévastation des territoires par l’exode, les migrations, les régimes dictatoriaux, autoritaires qui règnent en maître, pillent leur pays et affament leur population, le dérèglement climatique (manque d’eau potable, sécheresse, inondations …) Mais aussi la baisse importante de 15% de l’aide au développement. Et cette aide publique au développement n’est pas efficace car elle est l’héritière d’une politique néo-colonialiste qui provoque compromission avec des pays non démocratiques, corruption. La France verse un milliard d’€uros par an, c’est la contribution la plus importante mais comment se passe la redistribution, quel contrôle sur l’utilisation de cet argent ? Dans le budget, pas de lignes de dépenses en face des sommes versées et les politiques qui se sont mêlés de demander de la transparence sur les dépenses n’ont rien pu faire et se sont faits « virer ». C’est une politique : donner sans contrôle pour en tirer des avantages, produits agricoles, minerais, argent pour les partis politiques, influence. Les sommes distribuées sont de la prérogative du Président.

7 – Déclaration du Président. A suivre une déclaration du président Macron qui veut revisiter le pouvoir dans l’entreprise. Ci-après l’article : La gouvernance, futur « irritant » de la loi de transformation des entreprises ? Il faut s’y préparer, tant le propos du président Macron, à TF1, sur « la réforme de la philosophie de l’entreprise, qui ne peut être seulement l’endroit où se rassemblent les actionnaires » ouvre tous les possibles. Car derrière sa volonté de « revisiter » la participation et l’intéressement se profile une réflexion sur le pouvoir. Manière d’envoyer un signal à la CFDT, frustrée après les ordonnances : « La CFDT a demandé d’augmenter le nombre de salariés dans les conseils d’administration, sans avoir obtenu satisfaction, regrettait son secrétaire général dans Challenges. Idem pour la codécision dans l’entreprise. C’est une occasion manquée. » Christophe Castaner, le porte-parole du gouvernement, a bien reçu le message : « Si on veut réaffirmer la place des salariés dans l’entreprise, il faut changer la gouvernance » a t-il estimé, jugeant nécessaire de « casser le rapport entre l’autorité et le dépendant ». Aves des mots différents, toute une aile du patronat, notamment sous la houlette d’Antoine Frérot, PDG de Véolia et président de l’Institut de l’entreprise n’est pas opposée à une évolution : « L’entreprise n’est pas le seul lieu de la culture du profit » répète Frérot. De là à aller jusqu’à la « cogestion » ?
A suivre car dans ce projet de revoir la gouvernance dans les entreprises, c’est davantage de place pour les salariés, plus de participation, plus de partage des bénéfices. On peut comprendre « l’énervement » de Pierre Gattaz , président du Medef qui déclare : « Une entreprise n’appartient pas à ses salariés », mais à celui qui y a « mis de l’argent. C’est lui qui doit avoir le dernier mot. » !

Louis Caul-Futy Françoise Surette