INFO N° 6 – MARS 2016

Rappel : appel de la Préfecture pour l’animation des temps périscolaire dans les classes primaires de certaines communes de Haute Savoie. Intervenants extérieurs à l’Education Nationale. Si des volontaires sur l’agglo d’Annemasse se manifestent, Louis fera une réunion d’information et donnera le mode d’action. Le thème, le Vivre ensemble sur la base de dessins. Louis nous communique les communes en demande dès qu’il aura la liste.

A – France. Loi Travail, réforme du Code du Travail.
Journée de mobilisation ce 9 mars contre la loi. Les points principaux de la loi sont rejetés. Agitation entre salariés et patrons, salariés et gouvernement, étudiants et gouvernement.
Les articles : durée du travail, l’organisation, les conditions de licenciement, les indemnités.
1 – Durée maximum du temps de travail actuellement à 10 heures, pourra être portée à 12, 46 heures la semaine pendant 16 semaines maximum et on pourra aller jusqu’à 60 heures. Le temps légal reste à 35 heures mais la majoration des heures supplémentaires pourra changer en fonction des négociations au sein des entreprises. Le paiement des heures supplémentaires pourra être remplacé par un repos compensateur selon la volonté du salarié. Si pas d’accord dans l’entreprise, la norme sera de 25% en plus pour les 8 premières heures supplémentaires, de 50% pour les heures au-delà. Dans les entreprises, il y aura discussion sur la durabilité des emplois et s’il y a risque de licenciements, il y aura des accords de maintien de l’emploi, qui viseront à négocier une modulation du temps de travail et des rémunérations. Le risque est : plus de temps de travail pour moins de rémunérations, le patronat revendiquant la baisse du coût du travail
2 – Référendum dans les entreprises. A l’heure actuelle, dans la quasi-totalité des cas, un accord d’entreprise ne peut entrer en vigueur que s’il est approuvé par des syndicats représentant au moins 30% des suffrages lors des dernières élections professionnelles. Et sous réserve que les organisations de salariés pesant au moins 50% des voix ne s’y opposent pas. L’idée de la Ministre chamboule cet ordonnancement. Elle permet aux organisations qui représentent au moins 30% du personnel et qui ont signé un accord de « déclencher un référendum ». « Si la consultation donne plus de 50% en faveur du oui, cette accord s’applique » selon la ministre. (Selon un article du Monde du 27 janvier 2016).
Si les salariés ne sont pas d’accord, c’est qu’ils veulent mieux, il faudra alors une renégociation, le patronat devra faire des concessions, mais voudra t’il se remettre autour de la table ? Ce référendum crée quand même un discrédit des syndicats et des accords qu’ils pourraient obtenir. En France, les salariés sont peu syndiqués et les syndicats sont combattus par le patronat. Contradiction : un président qui vante les mérites du dialogue social mais son gouvernement qui invente une loi substituant au dialogue le référendum. C’est la fin des syndicats annoncée car avec un référendum il n’y a pas de dialogue social. Et qui votera à ces référendums quand l’intérêt commun ne touchera pas tous les salariés ? Par exemple les cadres voteront-ils alors que les discussions ne concerneront que les ouvriers ?
3 – Les licenciements économiques : aujourd’hui, les difficultés rencontrées par l’entreprise sont soumises à plusieurs contrôles, le patronat doit prouver les difficultés, et tout est soumis à un comité d’entreprise qui approuve ou non les dires du patronat. Un système de protection solide qui saute avec la loi. Le projet est une liste de six motifs de licenciement, le patron n’ayant plus besoin de fournir des preuves. Ces six motifs sont les suivants, un écrit signé du patron attestant : – des difficultés économiques – de perte d’exploitation – des problèmes de trésorerie – des mutations technologiques – une réorganisation interne indispensable – une cessation d’activité. Mais il n’y aura pas de cadre et les entreprises pourront interpréter comme elles l’entendent ces six motifs de licenciement.
4 – Les indemnités de licenciement : actuellement, si contestation, recours aux prud’hommes, le juge détermine le montant d’indemnités selon la situation particulière du travailleur en difficulté. La loi : les indemnités seront fixes. 2 ans d’ancienneté, maximum 3 mois de salaire. 2 à 5 ans, 6 mois de salaires. 5 à 19 ans, 9 mois et plus de 20 ans, 15 mois maximum. Le juge n’a plus à prendre en compte la situation particulière du licencié. C’est la fin du système prud’homale, les prud’hommes ont toujours été la bête noire du patronat.
5 – Compte personnel d’activité : un nouveau dispositif qui intègre, le compte personnel de formation (obligatoire mais qui se fait peu) + un compte de pénibilité pour des conditions de travail pénibles, travail de nuit … C’est une mesure positive, le seule hélas.
Dans le Rapport Badinter sur le Code du Travail, rapport demandé par le gouvernement en préparation de la loi, les juristes préconisaient que certaines garanties ne devaient pas être touchées. Si les licenciements sont soumis uniquement au bon vouloir du patronat, c’est une atteinte au Droit du Travail inscrit dans la Constitution. La loi dépasse de loin les préconisations qu’avaient avancées les 2 juristes et éloigne toute espérance de dialogue, de consensus, de vivre ensemble. Nous sommes dans une société ultra libérale et la loi met à mal tout système de régulation. Les conventions collectives s’effacent devant la loi.

Intervention des participants : amortisseurs sociaux qui limitent la casse de la crise – les actionnaires en France sont très heureux des performances de leur argent – les travailleurs français sont très productifs car encore protégés notamment sur la question de la santé.

Suite aux oppositions et manifestations, nouvelle version de la loi : le barème des indemnités prud’homales devient indicatif et non pas obligatoire. Ce sera toujours au juge de décider du montant de l’indemnité à partir d’un barème qu’il pourra ou non appliquer. Cette disposition n’est pas nouvelle puisqu’elle était prévue par la loi Macron votée à l’été 2015.

B – Les agriculteurs.
Contraintes des normes européennes, contraintes de la politique européenne agricole commune, contraintes de la concurrence. Les alertes n’ont pas été pris en compte, ni en France, ni à Bruxelles. Aujourd’hui, ce malaise est devenu une crise très importante, crise économique, crise politique, crise sociale, crise culturelle. Changement de culture et changement de mode de vie.
1 – Explications : on assiste à un autre développement de la paysannerie, une situation très différente de ce que les paysans vivaient auparavant, pas de préparation à cette nouvelle forme de travail, certains ne trouvent plus de sens à leur vie (suicide). Endettement des paysans : 54 milliards, la moyenne est de 172000 €, et la moyenne pour un jeune qui a repris l’exploitation, 220000 €. Aucune catégorie de travailleurs n’est dans cette situation. La paysannerie s’est construite sur la politique agricole commune avec de bonnes conditions dans le but de nourrir les populations, et pour y parvenir, régulation des prix pour éviter une concurrence débridée. Aujourd’hui, plus de régulation des prix.
Le monde paysan était constitué de 30% de la population en 1945, aujourd’hui, il représente 3 %. Depuis les années 90, processus vertigineux de modernisation, de technicité, de transformation : dans nos grands élevages, dans les grandes plaines de culture, plus de fermes, mais des entreprises, des usines avec des travailleurs agricoles qui ne sont plus salariés de l’exploitant. Ils sont sous contrat avec des entreprises qui forment les travailleurs agricoles et qui les louent selon les besoins. Le chef d’entreprise qui a la propriété des sols, n’a plus qu’une propriété fictive. Cette propriété fictive n’est plus qu’un rassemblement d’actionnaires qui exigent la valorisation de leurs actions. C’est un traumatisme supplémentaire de n’avoir plus la possession de ses propres terres. Toutes les lois agricoles édictées par Bruxelles ont été signées par nos gouvernements et le gouvernement actuel ne pourra pas régler la situation car elle lui échappe.
Modèles nord-américains avec 10000 vaches : il s’agit d’entreprises capitalistes agricoles un capitalisme concurrentiel, stabulation et plus de pâturages, déjections transformées en engrais, aucune préoccupation du bien-être des animaux ni de la protection de la terre ni de la santé des consommateurs – problème humain et problème environnemental – Aux USA, la moitié de la production du lait vient de ces fermes de 10000 vaches et nous en prenons le chemin. Chez nous il y a encore des lois qui interdisent certaines pratiques, les OGM, les gaz de schistes mais jusqu’à quand ?
2 – D’autres facteurs de crise : l’agriculture est sous la coupe de l’Europe mais d’une Europe contradictoire qui est capable de faire la politique commune agricole mais qui n’a pas été capable d’harmoniser les règles fiscales et de prix qui gèrent l’agriculture. Par exemple, Allemagne et France sont en concurrence et l’Allemagne a pu se moderniser et se concentrer grâce aux baisses de charge notamment sur l’élevage de porcs. Différents niveaux de valeurs ajoutées, par exemple production du porc : le producteur vend à un grossiste, puis à un distributeur, puis au super marché, enfin au consommateur. Plus il y a d’intermédiaires plus le prix final est élevé. 80000 producteurs de lait et seulement 5 collecteurs et transformateurs qui peuvent ainsi s’accorder sur les prix. 4 centrales d’achat qui se partagent aussi la plus-value sur les 80000 producteurs et les 66 millions de consommateurs payent tous ces intermédiaires. Ce système de libre concurrence ultra libéral qu’on impose aux paysans et aux entreprises n’est en fait plus un système de concurrence car il n’y a pas de concurrence quand il y a 4 centrales d’achat qui s’entendent sur les prix.
3 – L’avenir : une agricole autonome et économe : abandonner l’idée de la surproduction, respecter la nature, respecter les sols, faire de la bonne production, abandonner la mono culture. Arrêter de vouloir exporter toujours plus. Chercher de la production de qualité, en particulier le bio, bon pour la santé et les animaux. Mais pour cela il faut une volonté politique, il faut que les producteurs soient aidés, il faudrait un plan pour une restauration collective de qualité et de proximité.
L’agriculture et l’élevage pourraient survivre à condition de tenir compte des points ci-dessus. Deux voies possibles. La 1ère est l’actuelle, l’option d’aujourd’hui qui consiste à renoncer à protéger le marché, qui juge normaux les surplus de production qui sont censés faire baisser les prix, qui sanctionne les producteurs les plus fragiles, qui assainit le marché pour faire baisser les prix aux consommateurs. C’est la voie suicide.
La 2ème voie possible c’est d’essayer de faire une certaine régulation du marché en garantissant un prix (le 6ème plan en 1982). La suppression des quotas est une aberration, plus les producteurs produisent plus ils perdent de l’argent. Cette régulation permettrait de répandre moins de produits chimiques nocifs car plus de besoin de surproduire. Idéologie contradictoire du libéralisme : les pouvoirs publics n’ont pas le droit de subventionner les produits qui sont exportés sauf les produits de l’agriculture. C’est le seul métier qui soit subventionné sinon les producteurs meurent. Vendre avec l’aide de l’état, c’est contraire à la loi du marché, c’est encore une contradiction. C’est la voie régulatrice, intelligente mais qui se heurte au bloc libéral européen.

Louis CAUL-FUTY Françoise SURETTE