02 – DE L’ORIGINE DES INEGALITES PARMI LES HOMMES.

André SAUGE. Philosophe, philologue, spécialiste de la Grèce Antique. 18 octobre 2017 Selon Rousseau et son « Contrat social » et selon la « Déclaration des Droits » du Citoyen (Révolution française) et de l’Homme (ONU, de quelle inégalité s’agit-il ?
1750 : le discours de Rousseau sur l’inégalité est le départ mais à partir de ses présupposés, on peut dire que sa thèse ne marche pas. Il affirme que l’homme est bon, qu’il est un être non contradictoire, qu’il a toutes les capacités pour agir, se reproduire. Autonomie, liberté, chaque individu vit de manière indépendante selon sa propre loi et dispose de tous les moyens de l’intelligence et de la raison. Négation de l’idée de nature mauvaise, pas de pêché, pas de mal originel, l’homme est une créature comme tous les êtres vivants, non soumis au céleste, à un dieu. Et pourtant l’homme est partout asservi car il faut bien vivre ensemble donc se comparer, s’observer, chercher à l’emporter sur les autres. Et cette confrontation entraîne la 1ère des inégalités. Quand il faut coopérer pour survivre, certains plus forts dominent les plus faibles ou les plus pauvres d’où nouvelle inégalité. L’inégalité existe depuis l’origine des êtres vivants. Dans les sociétés animales relations dominants-dominés biologiquement nécessaires, pour survivre, se reproduire, pour la qualité de l’espèce. Qu’est-ce qui différencie l’homme de l’animal ? Qu’est-ce qui fait que l’homme pourrait échapper à la nécessité biologique de la domination ? C’est le langage, la langue qui est une institution organisée sur un double niveau d’articulation qui permet à l’homme d’échapper à l’instinct. 1er niveau, les sons, les phonèmes appris dès l’enfance pour entrer en relation. Une base sonore pour chaque langue qu’il faut apprendre à articuler et à organiser. 2ème niveau, construire des représentations d’un ailleurs, des hypothèses, ce niveau est le support de notre liberté. Rousseau ne pouvait pas dire que l’homme est libre s’il n’a pas de langage : pas de liberté, pas de conscience, pas d’âme, pas de raison sans langue.
L’histoire de l’homme est celle des inégalités, toutes les sociétés anciennes étaient partagées entre dominants et dominés. Nous les connaissons par les écrits et elles sont fondamentalement inégalitaires de type aristocratique. L’histoire pour l’Occident commence à Athènes. Avant Solon – 593 avant JC – culture des céréales, artisanat que familles aristocratiques et petits paysans se partagent. Le prestige c’est de maîtriser le cheval et ceux-ci vivent de la guerre, du pillage, des razzias sur les terres des voisins pour accroître leurs richesses. Les petits paysans se trouvent asservis, esclaves d’une minorité. Entre les deux groupes, les hommes âgés, les sages qui cherchent à rectifier cet état de fait. C’est Solon qui va jusqu’au bout, en arrachant les bornes qui représentent les dettes du petit paysan ; planter ces bornes, c’est asservir la terre et le paysan qui ne vient jamais au bout de sa dette et qui sera vendu avec sa famille à d’autres populations. Il interdit cet asservissement : aucun homme né à Athènes ne peut être asservi par un Athénien, c’est la notion de citoyen. Des grandes familles résistent, difficultés pour Soron qui auraient pu conduire à une tyrannie. 508 avant JC, réforme de Clisthène qui réorganise tout le territoire e, 3 régions géographiques et économiques où puissants et faibles, riches et pauvres sont réunis, chacun est un nombre entier répertorié dans un système comptable. 10 tribus qui élisent 50 conseillers pour 10 mois. Egalité absolue de la parole des citoyens quelque soit leur métier, leur statut social. Le principe de l’égalité est introduit et vécu dans la société athénienne, civique et politique. Egalité oui, mais pas pour les femmes qui ne participent pas à la vie politique ce qui pose la question du statut de la femme jusqu’à notre temps présent.
Avec Jésus de Nazareth, c’est la conception universelle de l’homme, conception humaniste intégrale, au-delà des conceptions de naissance et de culture. On soumet une épreuve à Jésus : que faut-il pour avoir ce qu’il faut pour vivre ? : aimer ton dieu de toute ton âme et accueillir ton prochain. Mais qui est mon prochain ? Celui qui appartient à ma société, à ma culture, mon compatriote, mon concitoyen ? La loi n’est-elle pas d’éviter toit contact, toute souillure ? Mais cela restreint la dimension de ton humanité. Le Bon Samaritain ne se conforme pas à la loi, il agit librement, il aide le blessé. Le proche n’existe pas à l’avance, le proche est celui qu’on rencontre, tout être humain est un autre. Respect absolu parce qu’il est l’autre.
Le Contrat social. 18ème siècle, 1ère tentative de réintroduire le statut du citoyen à la Révolution. Nous élisons des représentants qui, nous le pensons, respecteront le Contrat social. Le Pacte social, une association qui protège la personne et les biens, qui lui permet d’être autonome. Une force commune, une loi commune qui garantit l’autonomie de chacun. La volonté de tous est ma volonté, une volonté générale, c’est ce qu’explique Rousseau. Nous faisons confiance aux institutions qui veulent ce que nous voulons nous-mêmes.
Mais qu’en est-il dans la pratique ? Quelles raisons pour que la confiance soit abusée ? Et pourtant, nous sommes condamnés à faire confiance. Le Contrat social a eu une incidence plus forte sur la lutte contre les inégalités que la lutte des classes. La force n’engendre jamais le droit.
Conclusion : la langue nous inscrit dans une relation contractuelle avec l’autre. L’humanité a une histoire mentale, une évolution, des connections neuronales qui permettent à un moment donné, de jouer collectif.