N° 03 – CONFÉRENCE MERVEILLEUSE – NOËL, FÊTE DE LA LUMIÈRE.

BRIGITTE ROCHELANDET Docteur en histoire. 30 novembre 2016 – 34 participants.
Les plus belles traditions et légendes de Noël, traditions issues de la Nativité et des croyances locales, légendes du Moyen Age. Pour découvrir l’origine de Noël, du sapin, du calendrier et de la couronne de l’Avent. Du réveillon et des interdits pendant la nuit de Noël. Pour comprendre comment nos ancêtres fêtaient Noël. Un joyeux moment de souvenirs et de partage.

Noël, une fabuleuse histoire, une belle histoire et en l’évoquant, impossible de ne pas parler de religion car toute notre vie est marquée par les Dix Commandements et les péchés capitaux.

Nous partons de la naissance de Jésus. St Luc raconte l’Annonciation dans son évangile. Annonciation fêtée le 25 mars, 9 mois avant la naissance. Mais l’Annonciation est aussi racontée dans des textes secrets apocryphes qui sont là pour convaincre les gens. Pour l’Eglise orthodoxe, c’est l’évangile de l’enfance, une annonciation très symbolique en peinture au 12ème siècle et une autre au 16ème siècle sur le Mont Athos et dans les deux périodes, l’ange annonciateur est couronné de l’auréole. Marie est alors représentée comme une petite paysanne. Au 14éme siècle, c’est l’Annonciation occidentale avec Saint Martini, l’ange toujours et la branche d’olivier. Autre Annonciation, au 15ème siècle par Fra Angelico: Adam et Eve sont chassés du Paradis parce qu’ils ont compris qu’il y avait du bien et du mal, et là c’est le Saint Esprit qui s’adresse à Marie. De très nombreuses peintures évoquent l’Annonciation et la Nativité. Marie est enceinte, mais pas encore mariée, elle est seulement fiancée et risque la lapidation. Que fait Joseph ? Il pense à la répudier mais l’ange lui dit qu’il doit accepter l’enfant car c’est le Fils de Dieu. Ils vivent à Nazareth mais l’empereur César Auguste ordonne un recensement et ils partent à Bethléem en Judée, lieu de naissance de Joseph. Ils cherchent un lieu pour se mettre à l’abri et vont aller dans la grotte le 24 décembre. Pendant que Joseph dort, Marie accouche avec les anges. C’est la Nativité, les anges sont là, Joseph est présent aussi mais éloigné. Les deux sages-femmes baignent l’enfant. L’une doute et sa main se recroqueville mais Marie la lui pose sur son ventre et cette main redevient normale, et la femme croit. Les anges sont toujours présents, la vierge regarde son enfant et les bergers arrivent. Marie toujours avec son manteau bleu, un bœuf qui souffle son haleine chaude, Joseph est un peu plus près. Les bergers sont arrivés en suivant l’étoile du berger, c’est L’Adoration des bergers. Joseph est en dehors de cette scène, ce qui prouve qu’il n’est pas le géniteur, il n’est pas inclus dans la famille. Les anges sont habillés en prêtre et disent la messe. Jésus est à même le sol, dans le décor, il y a du blé, des fleurs symboliques, le blanc représente la virginité de Marie, le bleu la douleur à venir de Marie, les fleurs violettes représentent l’humilité. Jésus est venu sur terre comme un bébé.
Le Christianisme devient religion d’état en Occident à partir du 4ème siècle. On va mettre en place des fêtes, pour représenter la naissance et la mort.
La naissance : il faut trouver un moyen pour faire admettre la date du 25 décembre comme date de naissance de Jésus et éradiquer ainsi les anciennes croyances. Avant, du 17 au 24 décembre, on célébrait la fête de Saturne, la fête du solstice d’hiver, avec bougies et chandelles. Une œuvre représente une divinité qui sacrifie un taureau, divinité née d’une vierge, le 25 décembre dans une caverne. Date bien choisie pour recouvrir la fête de Saturne par la date de la naissance de Jésus. Nous sommes alors assujettis au calendrier Julien, le 25 décembre correspondant au solstice d’hiver mais en 1582 on passe au calendrier grégorien avec le 21 comme date du solstice et le 25 comme date de la naissance. La période de l’Avent : elle débute le 4ème dimanche avant Noël et le 1er jour marque le début de l’année ecclésiastique mise en place au 6ème siècle. De nombreux gestes traditionnels pendant cette période de joie mais on évite les relations sexuelles et donc pas de mariage. Temps de repos, on n’effectue pas de travaux agricoles, pas de couture conséquente sauf pour les linceuls. Les charpentiers, les bucherons n’ont pas le droit de travailler. Les paysans ont juste le droit de s’occuper des animaux. Des légendes vont naitre de ces interdictions comme le bucheron qui finit de couper le dernier arbre et qui meurt écrasé par cet arbre ou le charpentier qui veut finir son travail et qui tombe du toit. Ces légendes font prendre conscience aux gens de la solennité de l’Avent. On organise des veillées pour lire la bible, rire, manger et chanter. Les chants de Noël sont déjà chantés dans les couvents par les moines et à partir du 13ème siècle par les gens eux-mêmes, par les jeunes gens ce qui favorise le rire et le plaisir. Les traditions d’aujourd’hui proviennent toutes du Moyen Age : la couronne traditionnelle vert, rouge et or, soit de la lumière, va être améliorée au fil des siècles. La couronne représente le cercle, le vert la vie, la lumière le soleil. Johann Wichern, pasteur à Hambourg qui s’occupe de l’apprentissage d’enfants orphelins, pour les faire patienter en attendant Noël, fabrique une couronne avec 4 grosses bougies rouges qui représentent les dimanches et qu’il allume à chaque dimanche. Chaque jour de la semaine, il allume une petite bougie blanche. Et chaque dimanche il raconte les histoires de la Bible jusqu’à la nativité : une éducation pour apprendre la patience. Cette tradition va se développer chez les protestants et ensuite les catholiques la transformeront en utilisant du houx. Le houx en référence aux druides et à la Fuite en Egypte : la Sainte famille s’enfuit dans le désert, se cache mais il y a un petit arbuste qui va écarter ses branches pour protéger la famille et c’est du houx. Les branches de houx protègent, éloignent la foudre, soignent les animaux … Les trois couleurs, rouge, vert et or vont perdurées jusqu’en 1940 et à partir des années 80 la couronne est complètement laïcisée. On l’accroche à notre porte pour dire bienvenue. Le calendrier de l’Avent avec 24 fenêtres est né en Allemagne tout comme la couronne. C’est une invention plus pratique que la couronne et les bougies pour apprendre à compter les jours, apprendre l’histoire et patienter jusqu’à Noël. Et c’est seulement à partir de 1958 qu’apparaît le père Noël. Couronne, calendrier sont des objets festifs et éducatifs. La troisième tradition, c’est la crèche. Dès le 11ème siècle, dans les églises, on assiste à des processions avec des comédiens qui jouent le rôle de la Sainte Famille. Au 13ème siècle, ce sont des crèches vivantes avec les villageois, sous l’impulsion de St François d’Assise. Mais les villageois n’ont pas toujours le temps donc dès le 14ème siècle, ces crèches vivantes sont remplacées par des crèches figées, dans les églises. Au 16ème siècle, à la Réforme, les protestants vont refuser la crèche qu’ils jugent trop papiste et ne prennent que la représentation de Jésus et du coup, les catholiques vont faire encore plus, en exposant des crèches dans les chapelles des seigneurs. A la révolution, interdiction du culte et destruction des crèches.
Mais on n’écrase pas une tradition comme ça et par rébellion, les gens vont faire des crèches chez eux, en cachette. Et c’est l’invention des santons qui vont faire partie intégrante des crèches. Enfin on crée les crèches pour enfants qui apprennent ainsi le déroulement des événements autour de la naissance. Et enfin le sapin de Noël qui est le vrai symbole pour tous, y compris pour les non-croyants et les autres religions. Le sapin qui garde ses feuilles, un arbre persistant qui symbolise la vie éternelle. C’est la même chose en Egypte, en Chine avec d’autres essences d’arbres à feuillage persistant. La légende de Saint Boniface : pour lui, le chêne n’est pas une divinité, il fait abattre ce chêne qui tombe sur un sapin qui ne casse pas. A partir de 1521, en Allemagne, on décore un sapin qu’on plante dans le village et on commence à en mettre dans les maisons ; les habitants vont couper et voler des sapins dans les forêts. Cette tradition s’étend parmi les protestants. La femme de Louis XV fait mettre un grand sapin à la cour et elle le décore et plus tard la femme de Louis Philippe fera de même. Elles sont toutes deux allemandes mais leur exemple ne prend pas. Ce sont les soldats qui vont faire la guerre en Allemagne qui apporteront la tradition en France. Au 19ème siècle, inauguration du marché de Noël pour venir acheter son sapin. On le décore avec des pommes rouges et jaunes, des rubans, des roses en papier. En 1857, apparaissent les premières boules en verre ; c’est une année très froide qui fait qu’il n’y a plus de pommes au moment de Noël et c’est un verrier qui a l’idée de fabriquer des boules de verre de couleur rouge et jaune.
Enfin c’est le 24 décembre et c’est Le Réveillon. Il faut trois chandeliers qui représentent la trinité. Trois choses à faire : réciter le De Profundis, fermer la porte de l’étable après avoir nourri les bêtes, déposer et allumer une bûche dans la cheminée. Du 13ème au 17ème siècle, une bûche est offerte par les vassaux au seigneur. Louis XIV fait déposer une bûche dans toutes les cheminées de Versailles. C’est une tradition très vivace que celle de la bûche faite d’un bois qui brûle lentement, coupée en octobre et bien séchée. On la bénissait avec du vin et de l’eau bénite. Il faut bien la préparer pour ne pas rater l’allumage, effectué par le plus jeune de la famille ou le père et malheur si elle ne prenait pas bien, on craignait alors que l’arbre soit l’arbre de Judée auquel Judas se serait pendu. On comptait les étincelles, un rituel qui donnait le nombre d’âmes libérées. Enfin les cendres étaient étendues sur les champs. A minuit, c’etait l’heure de la messe et là aussi des légendes : un roitelet huppé, capturé par le prêtre et qui le lâche pendant la messe, celui qui le rattrape est alors le roi de la messe et est dispensé de payer la dîme. La rose de Jéricho, une plante qu’on mettait toute sèche dans l’église et qui renaissait lorsqu’elle était plongée dans l’eau pendant la messe, un miracle qui fonctionnait très bien.
De nombreuses légendes autour de la nuit de Noël : le mari qui ordonne à sa femme d’aller à la messe et qui reste seul avec l’enfant pour l’emmener avec lui chercher un trésor. L’enfant tombe malade, meurt ainsi que le père. Légende destinée à faire peur aux gens et les contraindre à aller à la messe. Les morts reviennent pendant la nuit de Noël. Il faut bien balayer devant l’âtre car la vierge vient visiter les maisons et elle ne doit pas salir sa robe

Quelques chants spécifiques à la Nativité : 16ème : Entre le bœuf et l’âne gris – 18ème : Il est né le divin enfant – 19ème : Trois anges sont venus ce soir – 1550 et 1824 : Mon beau sapin – 1857 et 1948 : Vive le vent – 1946 : Petit papa Noël.
Quelques spécificités culinaires : Au 17ème : 12 petits pains et un pain plus gros – Fin 18ème : figues, raisins frais et secs, pruneaux, oranges, pommes, poires, cédrat confits, biscuits, nougats – 1925 : 13 desserts.

Le père Noël est une création du 19ème siècle : c’est une personne âgée, avec une grande barbe comme Dieu le père, avec un habit rouge comme le pape, il va dans le ciel comme les anges, on lui rend un culte parce qu’on pense qu’il connaît tout de nous, qu’il sait si les enfants ont été méchants ou gentils. Un drôle de monsieur qui se promène dans le ciel … mais c’est une autre histoire !!!